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2ie de 3, surentrainement à quel prix

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http://www.radio-canada.ca/sports/PlusS ... opo1.shtml

 

 

Surentraînement À quel prix?

Mise à jour le mardi 22 février 2011 à 11 h 06

 

 

Dans ce deuxième reportage d'une série de trois, Diane Sauvé se penche sur les dangers du surentraînement.

 

Le sport qui se prend au sérieux, des jeunes qui s'investissent à fond, une recette qui mène parfois à la catastrophe.

 

Des athlètes sont victimes de surentraînement et doivent faire une croix sur leurs rêves. Des situations dramatiques, des carrières brisées.

 

« Quand j'ai eu mes quatre fractures de fatigue, les médecins m'ont dit qu'ils n'avaient jamais vu ça, que ça ne peut pas exister autant de fractures de fatigue sur les tibias en même temps », se rappelle Anne-Christine Voicu.

 

« Je ne le savais pas tout de suite ce que j'avais, et ça empirait tout le temps », renchérit Sébastien Landry.

 

Anne-Christine avait tout pour elle, championne canadienne de tennis chez les moins de 14 ans. Sébastien, lui, collectionnait les médailles : vice-champion canadien de patinage de vitesse aussi à 14 ans.

 

L'ex-champion olympique Éric Bédard l'avait même déjà remarqué.

 

« Je trouvais vraiment qu'il avait le gabarit pour performer et j'aurais vraiment aimé ça l'entraîner, de l'amener à un niveau supérieur », avoue Bédard.

 

Deux athlètes pleins de promesses, poussés au bout d'eux-mêmes, jusqu'à ce que tout flanche.

 

« Mon corps m'a dit : "Regarde, arrête, ça fonctionne plus. Si tu continues, moi je vais juste briser." »

 

Anne-Christine Voicu se voyait parmi les meilleures du monde. À 14 ans, la joueuse de Repentigny s'est exilée en France pour étudier à l'Académie Mouratoglou, qui a formé entre autres Marcos Baghdatis, ancien huitième joueur mondial. Le régime d'entraînement y était féroce.

 

« Quatre heures de tennis par jour, l'équivalent probablement en entraînement physique, 15 exercices de courses, de VO2 max, de développement musculaire en salle. »

 

Rajoutez à ça l'école qu'elle faisait par correspondance, en soirée après l'entraînement. « Tu embarques dans un moule où les gens t'imposent un rythme de vie et tu penses que c'est la solution, l'unique solution pour réussir. »

 

Les bouchées triples

 

 

Photo: Hebdo Rive-Nord

 

Anne-Christine Voicu

 

 

Sébastien Landry, lui, venait de connaître une saison prodigieuse, poussé vers l'avant par cinq médailles décrochées aux Championnats canadiens. Il a donc mis toute la gomme.

 

« Tout de suite après la saison de patin, j'ai embarqué sur le vélo de route. Je n'ai pas arrêté. J'ai fait beaucoup de vélo de route. »

 

« Je pense qu'il faisait des 100-150 km de vélo par jour, se souvient Pierre-Paul Landry, son père. C'était beaucoup trop. Ça, c'était dans sa période de repos. »

 

De retour sur la glace, le patineur de Pointe-aux-Trembles a pris les bouchées doubles, ou plutôt les bouchées triples. Il s'entraînait dans trois clubs à la fois.

 

« Ça tournait autour de 10 ou 11 entraînements par semaine. C'était beaucoup trop pour ce dont j'avais besoin et mon entraîneur n'était pas au courant de tout ce que je faisais. »

 

« Souvent, on trouvait qu'il en faisait trop, dit sa mère Isabelle Duclos. On lui disait qu'il devrait prendre une pause. Mais les adolescents, à 14-15 ans, ils pensent qu'il ne peut rien leur arriver, ils ont plein d'énergie. »

 

« De semaine en semaine, le volume, l'intensité de travail se sont accumulés sans que je sois au courant, précise Annie Sarrat, l'entraîneuse de Sébastien. Après cinq mois, c'est vraiment là que l'état de fatigue s'est installé. Il était rendu dans un état un peu trop avancé pour arriver à le contrôler. »

 

Maux de tête, insomnie, infections en séries, toux persistante, Landry voyait ses performances déraper. Il n'arrivait même plus à terminer ses entraînements.

 

« Il se levait le matin et ses jambes tremblaient, se souvient sa mère. Ça pouvait prendre une demi-heure avant que ça revienne à la normale. »

 

Corps brisés

 

De son côté, Anne-Christine Voicu a accumulé les blessures : quatre fractures de stress, deux à chaque tibia, de nombreuses foulures aux chevilles, aux poignets, deux côtes fracturées. Ces blessures l'ont souvent stoppée, alors que les autres progressaient. Le fameux cercle vicieux.

 

« Elles gagnent contre toi. Tu sens vraiment la différence. Et là, tu veux les rattraper, donc tu n'as pas le choix d'en mettre plus. Si tu en mets plus, tu te rends à la limite, donc tu es plus près encore de briser ton corps. »

 

Leur corps a brisé et ces deux jeunes ont été contraints d'arrêter de vivre leur passion.

 

 

Photo: L'Avenir de l'Est

 

Sébastien Landry

 

 

« C'est très difficile sur le moral, pense Landry. Ce n'est pas vraiment une dépression, mais tu es déprimé et pour assez longtemps. »

 

« Les jeunes sont plus vulnérables parce qu'ils ont moins de bagages, soutient Suzanne Leclerc, médecin qui a traité Sébastien et qui s'occupe de l'équipe canadienne de courte piste. C'est souvent leur premier échec, la première grosse difficulté qu'ils vont affronter. Pour eux, c'est souvent quelque chose de très gros à surmonter. »

 

Élise Martin a été la première pédiatre au Québec à pratiquer la médecine sportive. Des cas du genre, elle en voit aussi. Surtout en gymnastique et en patinage artistique, là où le corps est sollicité très tôt, là où le poids est un gros facteur pour les jeunes filles. Les dommages peuvent être considérables.

 

« On se retrouve dans une condition égale à la ménopause chez la femme, explique Mme Martin. Taux d'oestrogène bas, déminéralisation des os. Que l'enfant soit à l'écoute de son corps, il faut lui enseigner ça. »

 

On a ce qu'on appelle la triade de la femme athlète : trouble de conduite alimentaire, fracture de stress, ostéoporose, aménorrhée...

 

La suite

 

Aujourd'hui, Anne-Christine Voicu ne joue plus au tennis. Elle se contente de l'enseigner. Si elle revoit les mêmes excès, elle veut de son côté faire autrement.

 

« J'écoute le jeune. Quand il me dit qu'il est fatigué, je le prends en considération. Et je ne dis pas juste : "Non, on a du temps à passer sur le terrain." Je l'écoute. »

 

Sébastien Landry, lui, a repris la compétition après deux ans de repos. Il est maintenant beaucoup plus à l'écoute de son corps, beaucoup plus à l'écoute de son entraîneur.

 

« J'ai appris à toujours faire confiance à mon entraîneur, lui dire tous les entraînements que je fais par exemple. »

 

« On se dit toujours que c'est un jeune, qu'il n'y a pas de danger, pense la mère de Sébastien. Je pense que les adolescents ont des limites et qu'il faut essayer d'être à l'écoute. »

 

Le grand rêve, lui, semble toujours là, même si le retard fait mal...

 

« C'est un athlète, s'il rebondit, il va revenir fort, estime Éric Bédard. Il a su gagner, il a su se relever. Ce sont ces athlètes qu'on veut dans le fond. »

 

(D'après un reportage de Diane Sauvé)

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